sábado, 20 de junho de 2020

WEINTRAUB, LE JUIF RACISTE

Au Brésil, Jair Bolsonaro se résout à se séparer de Abraham Weintraub, son sulfureux ministre de l’éducation

Ce fervent bolsonariste était sous pression depuis des semaines, poursuivi en justice pour racisme, injures et diffusion de « fake news ». 
Par Bruno Meyerfeld  
L’ancien ministre de l’éducation, Abraham Weintraub, a annoncé sa démission du gouvernement, à Brasilia, le 18 juin.




Il était l’une des rares personnalités à côté de laquelle Jair Bolsonaro
 pouvait parfois, en comparaison, avoir l’air d’un dirigeant pondéré. 
Après un peu plus d’une année de gestion chaotique, le ministre 
de l’éducation brésilien, Abraham Weintraub, s’est finalement 
résolu, jeudi 18 juin, à quitter son poste.
M. Weintraub était sous pression depuis des semaines, 
poursuivi en justice pour racisme, injures et diffusion de 
« fake news »Jusqu’au bout, Jair Bolsonaro a pourtant 
tenté de sauver son fidèle allié – en vain. 
« La confiance, ça ne s’achète pas, ça s’acquiert »
a affirmé jeudi M. Bolsonaro, dans une vidéo diffusée
 sur les réseaux sociaux annonçant le départ de son ministre, 
avant d’échanger une fraternelle accolade avec lui.
Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Crash économique sans précédent au Brésil, en pleine crise sanitaire et politique
Ancien banquier et professeur d’économie à la carrière médiocre, 
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un 
des ministères les plus importants de la république. 
Rallié au candidat d’extrême droite durant la campagne 
victorieuse de 2018, il est malgré tout propulsé à la tête 
du portefeuille de l’éducation en avril 2019. A l’époque, 
Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les recteurs 
et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au 
pouvoir. C’est tout l’inverse qui se produira.
Abraham Weintraub, lors de sa nomination au poste de ministre de l’éducation, à Brasilia, le 9 avril 2019.

Volcanique et vulgaire

Sur le fond, le ministre part en croisade : promotion de l’école 
militarisée, lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux, 
ou les méthodes du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé 
de l’alphabétisation au Brésil). Weintraub s’attaque en priorité 
aux universités, soupçonnées par le pouvoir d’être des 
« repaires de gauchistes ». En 2020, le budget du ministère 
de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales voient 
s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget. Près de 
8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement 
supérieur sont brutalement coupées.
Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Au Brésil, les coupes budgétaires ravagent l’université
Mais c’est sur la forme que le ministre se distingue le plus. 
Weintraub, c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire,
 inspiré directement de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi 
d’Olavo de Carvalho, maître à penser de l’extrême droite 
brésilienne. En un an, Weintraub accuse pêle-mêle les universités 
d’accueillir sur leur campus des « plantations extensives de 
marijuana » ainsi que des « sans-terres et des gens à poil »
Il compare des perquisitions judiciaires à la « Nuit de cristal »
traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste », publie des 
Tweet ironiques et racistes contre la Chine, 
remplaçant les « r » par des « l » afin d’imiter 
un supposé accent chinois…
Lire aussi  Au Brésil, le ministre qui veut réduire les sciences humaines
Comble du comble pour un ministre de l’éducation : ses posts 
en ligne sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire 
ou de conjugaison… Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu 
de « Kafka », confondant boulettes de viande et auteur tchèque 
et devient la risée du Web… Qu’importe, Weintraub assume, 
toujours plus outrancier. En septembre 2019, il pose en train 
de ramasser les crottes de son chien, sac plastique à la main : 
« Les Weintraub sont une famille démocratique, dit la légende. 
Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche. Mais je ramasse 
toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »

L’outrage de trop

Qualifié de « pire ministre de l’éducation de l’histoire » par l’opposition, 
détesté par les militaires comme par les présidents des deux 
Chambres du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui. 
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle, 
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub 
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral 
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux, 
les magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de 
poursuivre le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion 
de « fake news ».
Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Dans le Brésil de Bolsonaro, les monarchistes se prennent à rêver de restauration
Mais Weintraub persiste et signe. Le dimanche 14 juin, il se rend 
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia, 
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de 
partisans, appelant à une intervention de l’armée. Gêné aux 
entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier son ministre, 
devenu « un problème de plus que nous essayons de résoudre »
selon les mots du chef de l’Etat.
Menacé de destitution, Jair Bolsonaro cherche à apaiser ses relations 
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours 
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub 
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême 
droite, victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le 
départ de deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du 
populaire ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de 
Weintraub, tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc 
un peu plus encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des 
ministres issus de l’armée.

Ancien banquier et professeur d’économie à la carrière médiocre, 
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un des 
ministères les plus importants de la république. Rallié au candidat 
d’extrême droite durant la campagne victorieuse de 2018, il est 
malgré tout propulsé à la tête du portefeuille de l’éducation en avril 
2019. A l’époque, Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les 
recteurs et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au pouvoir. 
C’est tout l’inverse qui se produira.

Abraham Weintraub, lors de sa nomination au poste de ministre de l’éducation, à Brasilia, le 9 avril 2019.






Volcanique et vulgaire

Sur le fond, le ministre part en croisade : promotion de l’école militarisée, 
lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux, ou les méthodes
 du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé de l’alphabétisation au 
Brésil). Weintraub s’attaque en priorité aux universités, soupçonnées 
par le pouvoir d’être des « repaires de gauchistes ». En 2020, le budget 
du ministère de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales 
voient s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget. 
Près de 8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement 
supérieur sont brutalement coupées.




Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Au Brésil, les coupes budgétaires ravagent l’université

Mais c’est sur la forme que le ministre se distingue le plus. Weintraub, 
c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire, inspiré directement 
de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi d’Olavo de Carvalho, 
maître à penser de l’extrême droite brésilienne. En un an, Weintraub 
accuse pêle-mêle les universités d’accueillir sur leur campus des 
« plantations extensives de marijuana » ainsi que des 
« sans-terres et des gens à poil ». Il compare des perquisitions judiciaires
 à la « Nuit de cristal »traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste », 
publie des Tweet ironiques et racistes contre la Chine, remplaçant les « r » 
par des « l » afin d’imiter un supposé accent chinois…




Lire aussi  Au Brésil, le ministre qui veut réduire les sciences humaines

Comble du comble pour un ministre de l’éducation : ses posts en ligne 
sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire ou de conjugaison… 
Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu de « Kafka », confondant boulettes
 de viande et auteur tchèque et devient la risée du Web… 
Qu’importe, Weintraub assume, toujours plus outrancier. 
En septembre 2019, il pose en train de ramasser les crottes de son chien, 
sac plastique à la main : « Les Weintraub sont une famille démocratique, 
dit la légende. Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche. 
Mais je ramasse toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »

L’outrage de trop

Qualifié de « pire ministre de l’éducation de l’histoire » par l’opposition, 
détesté par les militaires comme par les présidents des deux Chambres 
du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui. 
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle, 
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub 
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral 
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux, les 
magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de poursuivre 
le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion de « fake news ».




Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Dans le Brésil de Bolsonaro, les monarchistes se prennent à rêver de restauration

Mais Weintraub persiste et signe. Le dimanche 14 juin, il se rend 
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia, 
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de 
partisans, appelant à une intervention de l’armée. 
Gêné aux entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier 
son ministre, devenu « un problème de plus que nous essayons 
de résoudre », selon les mots du chef de l’Etat.
Menacé de destitution, Jair Bolsonaro cherche à apaiser ses relations 
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours 
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub 
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême droite, 
victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le départ de 
deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du populaire 
ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de Weintraub, 
tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc un peu plus 
encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des ministres 
issus de l’armée.





Nenhum comentário:

Postar um comentário