Au Brésil, Jair Bolsonaro se résout à se séparer de Abraham Weintraub, son sulfureux ministre de l’éducation
Ce fervent bolsonariste était sous pression depuis des semaines, poursuivi en justice pour racisme, injures et diffusion de « fake news ».
Par Bruno Meyerfeld
Il était l’une des rares personnalités à côté de laquelle Jair Bolsonaro
pouvait parfois, en comparaison, avoir l’air d’un dirigeant pondéré.
Après un peu plus d’une année de gestion chaotique, le ministre
de l’éducation brésilien, Abraham Weintraub, s’est finalement
résolu, jeudi 18 juin, à quitter son poste.
pouvait parfois, en comparaison, avoir l’air d’un dirigeant pondéré.
Après un peu plus d’une année de gestion chaotique, le ministre
de l’éducation brésilien, Abraham Weintraub, s’est finalement
résolu, jeudi 18 juin, à quitter son poste.
M. Weintraub était sous pression depuis des semaines,
poursuivi en justice pour racisme, injures et diffusion de
« fake news ». Jusqu’au bout, Jair Bolsonaro a pourtant
tenté de sauver son fidèle allié – en vain.
« La confiance, ça ne s’achète pas, ça s’acquiert »,
a affirmé jeudi M. Bolsonaro, dans une vidéo diffusée
sur les réseaux sociaux annonçant le départ de son ministre,
avant d’échanger une fraternelle accolade avec lui.
poursuivi en justice pour racisme, injures et diffusion de
« fake news ». Jusqu’au bout, Jair Bolsonaro a pourtant
tenté de sauver son fidèle allié – en vain.
« La confiance, ça ne s’achète pas, ça s’acquiert »,
a affirmé jeudi M. Bolsonaro, dans une vidéo diffusée
sur les réseaux sociaux annonçant le départ de son ministre,
avant d’échanger une fraternelle accolade avec lui.
Ancien banquier et professeur d’économie à la carrière médiocre,
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un
des ministères les plus importants de la république.
Rallié au candidat d’extrême droite durant la campagne
victorieuse de 2018, il est malgré tout propulsé à la tête
du portefeuille de l’éducation en avril 2019. A l’époque,
Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les recteurs
et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au
pouvoir. C’est tout l’inverse qui se produira.
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un
des ministères les plus importants de la république.
Rallié au candidat d’extrême droite durant la campagne
victorieuse de 2018, il est malgré tout propulsé à la tête
du portefeuille de l’éducation en avril 2019. A l’époque,
Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les recteurs
et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au
pouvoir. C’est tout l’inverse qui se produira.
Volcanique et vulgaire
Sur le fond, le ministre part en croisade : promotion de l’école
militarisée, lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux,
ou les méthodes du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé
de l’alphabétisation au Brésil). Weintraub s’attaque en priorité
aux universités, soupçonnées par le pouvoir d’être des
« repaires de gauchistes ». En 2020, le budget du ministère
de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales voient
s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget. Près de
8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement
supérieur sont brutalement coupées.
militarisée, lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux,
ou les méthodes du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé
de l’alphabétisation au Brésil). Weintraub s’attaque en priorité
aux universités, soupçonnées par le pouvoir d’être des
« repaires de gauchistes ». En 2020, le budget du ministère
de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales voient
s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget. Près de
8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement
supérieur sont brutalement coupées.
Mais c’est sur la forme que le ministre se distingue le plus.
Weintraub, c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire,
inspiré directement de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi
d’Olavo de Carvalho, maître à penser de l’extrême droite
brésilienne. En un an, Weintraub accuse pêle-mêle les universités
d’accueillir sur leur campus des « plantations extensives de
marijuana » ainsi que des « sans-terres et des gens à poil ».
Il compare des perquisitions judiciaires à la « Nuit de cristal »,
traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste », publie des
Tweet ironiques et racistes contre la Chine,
remplaçant les « r » par des « l » afin d’imiter
un supposé accent chinois…
Weintraub, c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire,
inspiré directement de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi
d’Olavo de Carvalho, maître à penser de l’extrême droite
brésilienne. En un an, Weintraub accuse pêle-mêle les universités
d’accueillir sur leur campus des « plantations extensives de
marijuana » ainsi que des « sans-terres et des gens à poil ».
Il compare des perquisitions judiciaires à la « Nuit de cristal »,
traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste », publie des
Tweet ironiques et racistes contre la Chine,
remplaçant les « r » par des « l » afin d’imiter
un supposé accent chinois…
Comble du comble pour un ministre de l’éducation : ses posts
en ligne sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire
ou de conjugaison… Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu
de « Kafka », confondant boulettes de viande et auteur tchèque
et devient la risée du Web… Qu’importe, Weintraub assume,
toujours plus outrancier. En septembre 2019, il pose en train
de ramasser les crottes de son chien, sac plastique à la main :
« Les Weintraub sont une famille démocratique, dit la légende.
Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche. Mais je ramasse
toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »
en ligne sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire
ou de conjugaison… Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu
de « Kafka », confondant boulettes de viande et auteur tchèque
et devient la risée du Web… Qu’importe, Weintraub assume,
toujours plus outrancier. En septembre 2019, il pose en train
de ramasser les crottes de son chien, sac plastique à la main :
« Les Weintraub sont une famille démocratique, dit la légende.
Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche. Mais je ramasse
toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »
L’outrage de trop
Qualifié de « pire ministre de l’éducation de l’histoire » par l’opposition,
détesté par les militaires comme par les présidents des deux
Chambres du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui.
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle,
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux,
les magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de
poursuivre le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion
de « fake news ».
détesté par les militaires comme par les présidents des deux
Chambres du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui.
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle,
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux,
les magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de
poursuivre le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion
de « fake news ».
Mais Weintraub persiste et signe. Le dimanche 14 juin, il se rend
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia,
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de
partisans, appelant à une intervention de l’armée. Gêné aux
entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier son ministre,
devenu « un problème de plus que nous essayons de résoudre »,
selon les mots du chef de l’Etat.
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia,
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de
partisans, appelant à une intervention de l’armée. Gêné aux
entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier son ministre,
devenu « un problème de plus que nous essayons de résoudre »,
selon les mots du chef de l’Etat.
Menacé de destitution, Jair Bolsonaro cherche à apaiser ses relations
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême
droite, victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le
départ de deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du
populaire ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de
Weintraub, tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc
un peu plus encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des
ministres issus de l’armée.
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême
droite, victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le
départ de deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du
populaire ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de
Weintraub, tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc
un peu plus encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des
ministres issus de l’armée.
Ancien banquier et professeur d’économie à la carrière médiocre,
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un des
ministères les plus importants de la république. Rallié au candidat
d’extrême droite durant la campagne victorieuse de 2018, il est
malgré tout propulsé à la tête du portefeuille de l’éducation en avril
2019. A l’époque, Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les
recteurs et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au pouvoir.
C’est tout l’inverse qui se produira.
rien ne prédestinait Abraham Weintraub, 48 ans, à diriger l’un des
ministères les plus importants de la république. Rallié au candidat
d’extrême droite durant la campagne victorieuse de 2018, il est
malgré tout propulsé à la tête du portefeuille de l’éducation en avril
2019. A l’époque, Weintraub dit vouloir « décréter la paix » avec les
recteurs et professeurs, échaudés par l’arrivée de Bolsonaro au pouvoir.
C’est tout l’inverse qui se produira.
Volcanique et vulgaire
Sur le fond, le ministre part en croisade : promotion de l’école militarisée,
lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux, ou les méthodes
du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé de l’alphabétisation au
Brésil). Weintraub s’attaque en priorité aux universités, soupçonnées
par le pouvoir d’être des « repaires de gauchistes ». En 2020, le budget
du ministère de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales
voient s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget.
Près de 8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement
supérieur sont brutalement coupées.
lutte contre la théorie du genre, les quotas raciaux, ou les méthodes
du pédagogue Paulo Freire (qui fut chargé de l’alphabétisation au
Brésil). Weintraub s’attaque en priorité aux universités, soupçonnées
par le pouvoir d’être des « repaires de gauchistes ». En 2020, le budget
du ministère de l’éducation fond de 17 % et 68 universités fédérales
voient s’envoler jusqu’au quart ou au tiers de leur budget.
Près de 8 000 bourses de recherche et d’étude dans l’enseignement
supérieur sont brutalement coupées.
Mais c’est sur la forme que le ministre se distingue le plus. Weintraub,
c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire, inspiré directement
de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi d’Olavo de Carvalho,
maître à penser de l’extrême droite brésilienne. En un an, Weintraub
accuse pêle-mêle les universités d’accueillir sur leur campus des
« plantations extensives de marijuana » ainsi que des
« sans-terres et des gens à poil ». Il compare des perquisitions judiciaires
à la « Nuit de cristal », traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste »,
publie des Tweet ironiques et racistes contre la Chine, remplaçant les « r »
par des « l » afin d’imiter un supposé accent chinois…
c’est d’abord un style, aussi volcanique que vulgaire, inspiré directement
de celui son mentor Bolsonaro, mais aussi d’Olavo de Carvalho,
maître à penser de l’extrême droite brésilienne. En un an, Weintraub
accuse pêle-mêle les universités d’accueillir sur leur campus des
« plantations extensives de marijuana » ainsi que des
« sans-terres et des gens à poil ». Il compare des perquisitions judiciaires
à la « Nuit de cristal », traite Emmanuel Macron de « crétin opportuniste »,
publie des Tweet ironiques et racistes contre la Chine, remplaçant les « r »
par des « l » afin d’imiter un supposé accent chinois…
Comble du comble pour un ministre de l’éducation : ses posts en ligne
sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire ou de conjugaison…
Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu de « Kafka », confondant boulettes
de viande et auteur tchèque et devient la risée du Web…
Qu’importe, Weintraub assume, toujours plus outrancier.
En septembre 2019, il pose en train de ramasser les crottes de son chien,
sac plastique à la main : « Les Weintraub sont une famille démocratique,
dit la légende. Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche.
Mais je ramasse toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »
sont bourrés de fautes d’orthographes, de grammaire ou de conjugaison…
Dans l’un d’eux, il cite « Kafta » en lieu de « Kafka », confondant boulettes
de viande et auteur tchèque et devient la risée du Web…
Qu’importe, Weintraub assume, toujours plus outrancier.
En septembre 2019, il pose en train de ramasser les crottes de son chien,
sac plastique à la main : « Les Weintraub sont une famille démocratique,
dit la légende. Même Capitu [le nom du canidé] est de gauche.
Mais je ramasse toujours ses propositions quand elle les expulse en public ! »
L’outrage de trop
Qualifié de « pire ministre de l’éducation de l’histoire » par l’opposition,
détesté par les militaires comme par les présidents des deux Chambres
du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui.
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle,
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux, les
magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de poursuivre
le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion de « fake news ».
détesté par les militaires comme par les présidents des deux Chambres
du Parlement, Weintraub fait l’unanimité contre lui.
L’outrance de trop a lieu le 22 avril, lors d’une réunion ministérielle,
dont la vidéo est rendue publique. A cette occasion, un Weintraub
déchaîné qualifie de « connards » les juges du Tribunal suprême fédéral
qui devraient, selon lui, être « jetés en prison ». Ni une ni deux, les
magistrats de la plus haute juridiction du pays décident de poursuivre
le ministre pour menace, appel à la haine et diffusion de « fake news ».
Mais Weintraub persiste et signe. Le dimanche 14 juin, il se rend
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia,
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de
partisans, appelant à une intervention de l’armée.
Gêné aux entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier
son ministre, devenu « un problème de plus que nous essayons
de résoudre », selon les mots du chef de l’Etat.
(sans masque) à une manifestation progouvernementale à Brasilia,
et réitère ses insultes sous les applaudissements d’une poignée de
partisans, appelant à une intervention de l’armée.
Gêné aux entournures, Bolsonaro décide finalement de sacrifier
son ministre, devenu « un problème de plus que nous essayons
de résoudre », selon les mots du chef de l’Etat.
Menacé de destitution, Jair Bolsonaro cherche à apaiser ses relations
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême droite,
victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le départ de
deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du populaire
ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de Weintraub,
tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc un peu plus
encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des ministres
issus de l’armée.
avec le Tribunal suprême fédéral. Mais alors que le Brésil fait toujours
face à l’épidémie due au coronavirus, la sortie d’Abraham Weintraub
remet en cause les fragiles équilibres du gouvernement d’extrême droite,
victime, ces derniers mois, d’une véritable hémorragie, avec le départ de
deux ministres de la santé, une secrétaire à la culture et du populaire
ministre de la justice, Sergio Moro. Avec la démission de Weintraub,
tenant d’une aile « idéologique », le pouvoir semble donc un peu plus
encore se resserrer autour de « l’aile militaire » et des ministres
issus de l’armée.
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